mercredi 21 juillet 2010

Le vieil homme et la jeunette by Guillaume Rouan

Cet homme là doit susciter l’admiration des amis de sa génération, sa femme est toute jeunette et fraichette et il n’a pas beaucoup d’argent. Il espère donc qu’elle l’aime sincèrement. Elle voit peut-être en lui le père qu’elle n’a jamais eu et puis c’est mignon ils se sont rencontrés sur leur lieu de travail. Je pensais à tout ça pendant que sa jeune petite femme avait la main posée sur ma cuisse et qu’il me regardait de loin suspicieusement.

C’était lors du week-end de l’entreprise dans une base nautique verdoyante.
Un buffet était dressé autour de nombreuses tables.
La vodka tiède coulait à flot.

J’évoluais dans un demi brouillard, je souriais comme un idiot, sans raison, j’étais saoul et sa petite jeunette aussi. Puis l’heure de danser arriva, je me tenais assez éloigné de la jeunette, le vieil homme me faisait peur, il était sacrement solide, son visage était dur et j’avais la sensation qu’il me surveillait.
Les heures passaient et jeunette était déchaînée, le pauvre vieil homme essayait de faire bonne figure en dansant avec elle dans son Tshirt jaune à la mode mais il n’était que gestes disgracieux et mouvements désordonnés. La jeunette dansait frénétiquement faisant rouler ses hanches et bougeant avec grâce ses petites jambes fines et bronzées, elle ne lui accordait aucune attention.

L’homme quitta la piste de danse. Je le retrouvais seul quelques minutes plus tard sur une table en bois. Il buvait les yeux noyés dans le vide. Il me regarda avec un sourire étrange, il avait un œil plus ouvert que l’autre. Je bus un verre avec lui, de notre place on pouvait voir sa petite jeunette s’agiter. La réalité, la vie le rattrapait à grandes enjambées et le giflait en plein visage. Durant cette nuit je pris soin d’éviter les bras et les regards langoureux de la jeunette, je la fuyait comme la peste. J’éprouvais une profonde tristesse en voyant le vieil homme seul à sa table, son visage rongé par l’angoisse. La nuit était longue et il encaissait sans broncher ces interminables heures de souffrance.

C’était trop beau vieil homme, beaucoup trop beau, la vie est une belle salope et les choses ne sont jamais aussi faciles.

En me levant le matin je partis me baigner dans la rivière et j’aperçu le vieil homme qui marchait avec la jeunette, il lui tenait la main et avait l’air heureux et apaisé.

Jusqu'à la prochaine fois vieil homme, jusqu'à la prochaine fois.

Guillaume Rouan

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